Cycle « Sport et religion » coordonné et assuré par Ghaleb BENCHEIKH et Marie LEVANT
Cours assuré par Etienne PENARD,Historien du sport, maître de conférences à l’Université catholique de l’Ouest.
Les sports modernes naissent dans l’Angleterre du XIXe siècle, puis se diffusent rapidement à travers le monde. Les Juifs ne tardent pas à s’approprier ces activités naissantes : dès la fin de ce siècle, des clubs sportifs communautaires sont créés dans la plupart des pays dans lesquels la diaspora juive est établie. Les Juifs d’Allemagne fondent notamment des dizaines de structures de gymnastique, tandis qu’en Autriche se crée en 1909 le fameux club Hakoah de Vienne qui brille sur la scène sportive internationale et devient en quelques années l’un des meilleurs clubs multisports du monde. Dans le même temps, des athlètes juifs Hongrois, Allemands, Autrichiens ou Français brillent lors des premières éditions des Jeux olympiques modernes. Cette dynamique sportive s’intensifie jusqu’à la Shoah et de nombreux clubs juifs naissent un peu partout dans le monde. Deux principaux éléments fournissent des explications pertinentes à la création de ces clubs communautaires. Ils naissent, en premier lieu, en réponse à l’antisémitisme de clubs locaux ou de gouvernements qui limitent ou interdisent la présence de Juifs dans les associations. Ils répondent, en second lieu, à des enjeux politiques, souvent sionistes – pour former « par le muscle » une nouvelle génération de Juifs capable de conquérir le futur État d’Israël -, parfois socialiste ou communiste pour défendre la cause prolétarienne.
Ce cours vise à présenter la naissance et le développement de ces pratiques sportives juives en se focalisant plus particulièrement sur le cas français, en tous points singulier. En effet, contrairement à leurs coreligionnaires européens ou africains, les Juifs de France ne créent pas de clubs sportifs avant l’entre-deux-guerres et leurs pratiques restent également moins développées. Il faut attendre un « réveil » de la jeunesse juive des 1920 et la résurgence de l’antisémitisme des années 1930 pour que les Juifs organisent des activités sportives. Les Juifs se regroupent d’ailleurs très majoritairement selon leurs origines géographiques et socio-culturelles (ashkénazes ou sépharades) et leurs orientations politiques. Les clubs Maccabis qui naissent à partir du milieu des années 1920 en région parisienne ou dans l’Est de la France sont par exemple constitués principalement de Juifs originaires d’Europe de l’Est particulièrement sensibles au sionisme. Ils participent d’ailleurs aux Maccabiades, sortes d’olympiades juives sionistes organisées à Tel-Aviv à partir de 1932. Le Yidishe Arbeter Sport Klub (YASK) attire quant à lui des Juifs yiddishophones souvent opposés au sionisme mais engagés dans la lutte prolétarienne auprès du Parti Communiste Français ; tandis que des clubs sépharades regroupent de Juifs originaires d’Afrique du Nord.